Une guerre civile !
Un soir de lampes basses de novembre
La route tient en laisse les villages
Une femme pose un regard éteint
Sur un verre vide, des larmes au fond
Un arbre broute les vitres de son enfance
Le soleil agite soudain en rêve des brins de mimosa
Mais d’autres regards, elle a usé dans les salles d’attente
Alors que tous les trains étaient déjà passés
Elle a roulé dans tant de glaises
Et touché tant de fonds marins
Que devant un ciel épaule nue elle se dit
À chaque vie d’être vécue…
Vite elle s’enfuit dans l’ombre des celliers
De son enfance pêchant à pleines mains
Des pichets de lumière
S’enivrant des chants de cerisiers
Qui lui glissent des bouts de ciel
Entre les doigts et lui serrent
Le cœur comme un coquillage marin
Et de tout son silence naît une voix
Comme une lampe allumée ferait
Sur les joues grises du temps
Posant sur ses paupières fatiguées
Sous les sourcils de la nuit qui se froncent
Une fleur entrouverte dans un pays mené
De biais par les averses de la haine
Une odeur d’églantine et de menthe coupée
Fourvoie alors un temps cette femme
Joie brillante soudain dans ses yeux
Comme un bouquet de fleurs mouillées
Dans une nuit trop belle couleur de thym
Comme un paradis à deux pas d’ici
Mais les bleus aux yeux ne l’empêchèrent pas d’entendre
Cette voix confuse de bête féroce qui s’élevait dehors
Comme lancée sur la voile d’un gréement un soir de tempête
Bousculée par les vagues d’un destin poignant
La folie brûlait encore dans un éclatement de châtaigne
Toujours plus grande à chaque fois qu’elle tombait
Ils ont perdu la direction le Nord l’étoile
Les feux de position, pensa-t-elle
Mais ils restent encore debout près
Du monde entier cantonné à les regarder
Dorée par le soleil et sa mélancolie
Qui ruisselaient tristement
Parmi les tournesols oniriques
À cette heure tardive d’un soir de novembre
Parmi les enfants innocents de la balle
Loin du feu et de la révolte
Elle entendit un éclat de rire dément
Qui venait de prendre un petit siècle en une nuit.
le 11 novembre 2005